La nouvelle avait fait boum chez les fans d’animation japonaise. Début septembre, le studio Science SARU, cofondé par le réalisateur Masaaki Yuasa (The Tatami Galaxy), annonçait sa nouvelle série The Heike Story, adaptation d’un classique de la littérature japonaise. Mais là n’était pas la vraie surprise. Sa réalisatrice était en effet plus connue comme tête de proue de Kyoto Animation, studio adoré ravagé par un incendie criminel en juillet 2019. En plus des deux saisons de K-On! et Sound! Euphonium, Naoko Yamada y avait signé des longs-métrages remarqués, comme Silent Voice et Liz et l’Oiseau bleu. L’heure était au départ, vers un projet au thème ad hoc : l’impermanence.
Diffusé chaque mercredi sur Wakanim, The Heike Story nous transporte dans le Japon de la fin du XIIe siècle, au coeur des événements précédant la terrible guerre de Genpei. Un pan de l’histoire nippone raconté dans Le dit des Heike, célèbre chronique poétique issue de la tradition des conteurs aveugles, les biwa hoshi, dont la version modernisée par l’écrivain Hideo Furukawa sert de base à l’animé. Dans les livres d’histoire, l’affrontement final entraîne la prise de pouvoir de Minamoto no Yoritomo, lequel instaure le shogunat de Kamakura. Mieux vaut cependant achever la leçon ici pour ne pas gâcher la surprise…
Revenons plutôt au début. Les quatre premiers épisodes de The Heike Story se concentrent sur le clan Taira, aussi appelé Heike, qui contrôle une bonne moitié des 66 provinces que compte alors le Japon. Seulement, comme l’annonce le très beau poème de l'impermanence par lequel s’ouvre l’oeuvre : “La couleur des fleurs de sal rappelle que tout ce qui prospère inéluctablement déchoit.” Les intrigues ne tardent pas à menacer le clan dirigé par Taira no Kiyomori, la faute à l’empereur retiré Go-Shirakawa, agacé par le comportement de celui qui fut pourtant son allié. Au milieu des adultes, un personnage haut comme trois pommes détient peut-être la clé de l’avenir de la famille : la conteuse Biwa.
Son nom n’a bien sûr pas été choisi au hasard. Les biwa hoshi étaient nommés ainsi car ils s’accompagnaient au biwa, un dérivé du luth. Au début de l’animé, la petite Biwa voit son conteur aveugle de père être tué par la police des Taira pour une broutille. Désespérée, elle va réclamer sa propre exécution aux responsables du clan, non sans avoir d’abord prédit la ruine au fils de Taira no Kiyomori, Shigemori, qui la trouve là. Car l’oeil droit de la fillette a le pouvoir de voir l’avenir, et il n’est pas brillant. Malgré l’offense, le bon héritier, qui voit les défunts de son oeil gauche, décide de l’épargner et de l’accueillir. Avec autant de compassion que de pragmatisme.
The Heike Story est ainsi habité par une myriade de sentiments, des plus doux aux plus douloureux, comme le promettait un tel récit. Lequel est servi par des décors élégants qui semblent peints à même une feuille de papier à dessin, et par un character design d’une grande douceur, conçu originellement par la mangaka Fumiko Takano. Les moments suspendus font merveille, notamment dans le premier épisode signé Naoko Yamada, même si j’attends de voir s’ils survivront à la nécessité de faire avancer l’histoire. Au doublage, Aoi Yuki rend les grognements de la petite Biwa absolument irrésistibles. Mais là n’est pas son seul langage…
L’animé est en effet parsemé de moments où Biwa joue, comme son nom l’indique, du biwa, et se fait la conteuse des fortunes et infortunes du clan Taira. Le son de l’instrument est ainsi fréquemment entendu et donne à l’histoire une portée légendaire. La musique n’est cependant pas toujours très traditionnelle, sans que cela choque outre mesure. Les génériques de début et de fin, composés respectivement par Hitsujibungaku et agraph, sont d’ailleurs tous les deux très beaux. Mêler hip-hop et Japon du XIIe siècle ? The Heike Story l’a fait, et ça marche. Vivement mercredi prochain !
■ LA SEMAINE
Himari Tsukishiro, membre du groupe de kawaii metal lovecraftien NECRONOMIDOL, va se lancer en solo avec un premier morceau en collaboration avec King Dude, chanteur américain officiant dans un style dark folk. C’est peut-être la phrase la plus niche jamais écrite dans cette newsletter, et pourtant, il y a de la concurrence. Connaissant les deux artistes, je suis très curieux du résultat. A noter que le groupe va passer son mois d’octobre en Europe mais sans avoir prévu de date française, du moins pour l’instant.
Maaya Sakamoto se retire d’une comédie musicale à cause de problèmes de santé. Tomoko Kanazawa quitte Juice=Juice à cause de son endométriose. Le fondateur de SM Entertainment Lee Soo-man nommé dans les Pandora Papers. Le site Korean Indie fête ses 10 ans et liste les albums de la décennie. L’ex-9MUSES Ryu Se-ra en a marre des dick pics sur Instagram. Une femme pénètre dans les locaux d’une agence K-pop pour harceler un groupe masculin. Le réalisateur Ryusuke Hamaguchi voulait tourner Drive My Car à Busan. Une adaptation en animé de la saga Shenmue diffusée par Crunchyroll en 2022. Anime Digital Network lance un tarif dégressif jusqu’à 4,79€ par mois. Mais pourquoi donc Haruki Murakami n’est toujours pas Nobel de littérature ? La nouvelle Switch OLED a un bel écran mais aurait aussi de meilleurs Joy-Con. Le studio Eidos de Montréal passe à la semaine de quatre jours.
■ LE MORCEAU
Le groupe pop-rock japonais Passepied a révélé mercredi un single lumineux à l’approche de la sortie de son 7e album Nuit, prévue pour le 8 décembre. Je vous mets au défi d’écouter Iwanakya et de ne pas oublier au moins quatre minutes la fraîcheur automnale. Plus je l’écoute et plus je me sens bien. A noter qu’il s’agit du 5e single numérique sorti par le quintet cette année.
■ L’OBJET
Alors que Goldorak fête ses 45 ans, La Poste sort un bloc de deux timbres à l’image de la franchise qui a marqué tant de têtes blondes. Disponibles à partir du 11 octobre, ils ont été officiellement présentés jeudi à la MCJP, la Maison de la culture du Japon à Paris, où se tient également une exposition en rapport (voir agenda). Les plus pressés d’entre vous peuvent déjà se procurer les timbres samedi au Carré d’Encre à Paris et jusqu’à dimanche à la Cité des Congrès de Valenciennes.
■ LE DESSIN
■ L’AGENDA
📷 L’exposition Moriyama - Tomatsu : Tokyo continue à la Maison européenne de la photographie jusqu’au 24 octobre. S’y trouvent plus de 400 photos de Daido Moriyama et Shomei Tomatsu, chacun occupant son propre étage. L’amour du noir et blanc est recommandé.
5/7 rue de Fourcy, 750004 Paris
📷 La Maison européenne de la photographie accueille avec Home Again l’oeuvre unique de la japonaise Mari Katayama. Atteinte d’une maladie rare, elle a choisi l’amputation des jambes à neuf ans et réalise aujourd’hui des autoportraits où elle met en scène son corps. A voir jusqu’au 24 octobre.
5/7 rue de Fourcy, 750004 Paris
📺 La Maison de la culture du Japon à Paris dédie une exposition à UFO Robot Grendizer, alias Goldorak, pour son 45e anniversaire. Intitulé Goldorak-XperienZ, l’événement se veut une rétrospective de la franchise de robot, arrivée sur les écrans français en 1978. Les places sont en vente sur Fnac Spectacles. Fin de l’exposition le 30 octobre.
101 bis quai Branly, 75015 Paris
✂️ Le Centre culturel coréen à Paris propose l’exposition Hangeul : l’alphabet coréen à la rencontre du design jusqu’au 15 novembre. Créé au XVe siècle par le roi Sejong le Grand, le hangeul est ici revisité par des créateurs contemporains.
20 rue la Boétie, 75008 Paris
🎥 Le cinéma MK2 Bibliothèque programme 12 films d’animation japonaise à raison d’un par dimanche jusqu’au 12 décembre. Les deux derniers films ne sont pas encore connus, mais sont déjà annoncés Akira, Violet Evergarden ou encore Liz et l’Oiseau bleu. Prochaine avant-première : Poupelle de Yusuke Hirota le 28 novembre.
128/162 avenue de France, 75013 Paris
🎥 Les mêmes films sont également projetés le samedi au cinéma MK2 Parnasse jusqu’au 8 janvier 2022, avant-premières comprises. Poupelle de Yusuke Hirota est prévu pour le 27 novembre. Dernière chance samedi pour voir Les Enfants de la mer d’Ayumu Watanabe.
11 rue Jules Chaplain, 75006 Paris
🖼️ Le Musée du quai Branly - Jacques Chirac propose jusqu’au 16 janvier 2022 l’exposition Ultime combat. Arts martiaux d’Asie. Le Japon y a bien sûr sa place, en témoigne la présence de la Lady Snowblood de Kazuo Kamimura sur certaines affiches. Des projections et conférences ainsi qu’une nocturne viendront ponctuer l’événement.
37 Quai Branly, 75007 Paris
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C’était Cyberia N°#013. A samedi !
@presenceinwired